Vous avez dit Guinguette ?

La Guinguette à Montmartre, Vincent van Gogh 1886 (musée d'Orsay, Paris)

L’histoire des guinguettes remonte au début du 18e siècle.  Vers 1715 apparaissent les premiers établissements situés aux portes de Paris, … hors de portées des taxes. L’origine du mot est controversée : allant d’un cabaretier dénommé Pierre Guinguet qui aurait ouvert un établissement portant son nom, jusqu’au nom d’un vin local appelé «Guinguet » réputé être « tellement aigre qu’il pouvait faire danser les chèvres ». Le mot guinguet viendrait aussi d’un verbe ancien signifiant « sauter, folâtrer ». 

Avant le code Napoléon, les meuniers avaient le droit de vendre les produits de leur travail sur le moulin et ils avaient l’autorisation d’exploiter une vigne aux alentours immédiats. C’est sur les bords de la Seine et de la Marne que  les guinguettes ont initialement prospéré.  Les gens y allaient le dimanche flâner et boire « le petit vin blanc » comme le dit la chanson.

L’absence de taxes sur les vins a certainement contribué au succès des guinguettes !  D’ailleurs au fur et à mesure où Paris s’agrandissait, les guinguettes s’éloignaient progressivement du centre.

Le Bal du Moulin de la Galette,  Auguste Renoir 1876 (musée d’Orsay, Paris)

Les guinguettes, c’est aussi l’histoire des premiers loisirs populaires qui a inspiré tant d’artistes - peintres, écrivains, photographes, ou auteurs de chansons. Le canotage prend une place importante mais aussi la baignade, les bals musette, la gastronomie et diverses attractions dont l’animation musicale reste le point d’orgue.  L’ambiance de fête y règne jusqu’à la 1ère guerre mondiale et puis les établissements ferment à nouveau pendant la 2e guerre mondiale pour rouvrir progressivement à partir de 1945, mais dans des conditions économiques et sociales très différentes.  L’interdiction de la baignade dans la Seine et la Marne en raison des eaux polluées accélère leur déclin pendant plusieurs décennies.

Et pourtant, l’histoire des guinguettes ne s’arrête pas là !  Lieux de mémoire collectif et d’identité culturelle très forte, les guinguettes semblent gagner en popularité, été après été.  On en trouve un peu partout, la plupart près des cours d’eau ou des lacs.

A lire : "Mémoire des guinguettes", de Francis Bauby, Sophie Orivel, Martin Pénet et de leurs amis collectionneurs, édition Omnibus

 

Zoom sur la renaissance d’une guinguette classée au Patrimoine culturel 

 

L’été 2017 a vu la réouverture d’un lieu mythique inscrit dans la mémoire des Périgourdins et bien au-delà : La Guinguette de Barnabé, située « rue des Bains », quartier de la  Cité-Bel-Air, à Boulazac, (jouxtant Périgueux).  Le site, au bord de la rivière Isle, est connu depuis 1900 comme lieu de baignade et, à l’entrée en guerre des Etats-Unis en 1917, un vaste camp de l’armée américaine et son hôpital militaire pour 2000 blessés s’installe à côté.   Au lendemain de la guerre on y trouve des cabines de bain et un restaurant, faits de matériaux de récupération provenant des baraquements américains.

 

Puis, en 1935 un bâtiment typique au style Art déco est érigé au bord de l’eau par le menuisier corrézien Léopold Foussard.  Ayant débuté sa carrière à Paris, Foussard s’est inspiré des guinguettes des bords de Seine.

 

Quelques transformations s’ensuivent au début de l’après-guerre (bar, mini-golf) et, en 1954,  y est créé le 1er camping homologué du département.

 

 

  

 

 

 

Parmi les clients des années cinquante : les militaires des casernes de Périgueux, ainsi que les militaires du Camp américain  de Chamiers (jusqu’en 1966). Dans les années 1960 et 1970, la guinguette devient un lieu populaire attirant de 300 à 400 personnes tous les jours, notamment pour la baignade.

 

En 2007, la guinguette Barnabé est classée au titre du Patrimoine du xxe siècle, la protégeant ainsi d’une démolition ou d’une transformation dommageable.

 

La Guinguette de Barnabé est restée dans la famille Foussard, jusqu’en 2013 où elle fut rachetée par la municipalité de Boulazac pour la somme de 800 000€.  S’en suivit un appel à projets pour trouver un futur gestionnaire.  Le choix s’est porté sur le dossier de trois entrepreneurs locaux – Jean-Michel Lavaud de l’entreprise de peinture EGAP, David Godard, de l’entreprise DG Néon, et Sébastien Vidal de l’entreprise de BTP, tous trois dédiés à faire renaître les lieux qu’ils fréquentent depuis leur adolescence.   

 

Après huit mois de travaux titanesques, au coût de 1.5 million d’euros, la guinguette a réouvert ses portes avec 15 jours d’avance, pour coïncider avec la commémoration du Centenaire du Camp Américain de la Cité Bel Air.

 

Si les générations passées se souviennent, non sans nostalgie, de la rotonde, le pergola, du bac à poulies aux allures de gondole et du mini-golf (reprenant des monuments de la Dordogne), sans oublier les premiers flirts lors des après-midi « musette », ceux et celles qui le découvriront n’en seront pas moins impressionnés !

 

 

 

 

 

A regarder sur YouTube:

Réouverture de la guinguette Barnabé à Boulazac France 3 Nouvelle-Aquitaine

Découvrez la Guinguette de Barnabé à Boulazac

 

A lire :

 « La Cité Bel Air, 1917-2017. Cent ans d’histoires » de Pascal Serre

http://www.gaphil.com/AB-SOUSCRIPTION-01.pdf

 

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